LITTLE HAITI (Le Floridien) — Garry Conille, récemment nommé Premier ministre intérimaire d’Haïti avec le soutien de la CARICOM et des États-Unis, effectue son premier voyage officiel. Ancien cadre des Nations Unies et réputé proche du clan Clinton, Conille est aux États-Unis depuis le vendredi 28 juin. Il doit y rencontrer, entre autres, Jon Finer, adjoint au conseiller à la Sécurité nationale, ainsi que des dirigeants de fonds internationaux, selon une note de presse de son cabinet.
Avant de se rendre dans la capitale fédérale, le Premier Ministre s’est arrêté à Miami pour une réunion avec la représentante américaine Frederica Wilson (24e district de Floride) et des leaders de la communauté haïtienne du sud de Floride. Initialement prévue pour 13h, la rencontre a finalement débuté à 14h. On apprend que le nouveau PM devait dans la matinée s’entretenir avec un groupe de personnalités (en majorité des Haitiano-Américains) en privée dans une résidence du quartier huppé de Coconut Groove.
Lors de cette réunion à huis clos à l’église catholique Notre Dame d’Haïti, qui a duré plus de deux heures, Conille a expliqué à des invités triés sur le volet comment « Haïti peut organiser des élections sûres et sécurisées sans la corruption » qui a entaché certaines élections passées. La formation de la constitution, l’aide humanitaire, les soins de santé et l’intégration des enfants dans des activités pour prévenir le recrutement par les gangs dès l’école primaire ont également été abordés.
Les discussions ont porté sur l’avenir d’Haïti et surtout sur le rôle crucial que pourrait jouer la diaspora haïtienne dans la récupération du pays. « Nous savons avec certitude que la seule façon de nous en sortir avec succès dans les 20 prochains mois est si nos frères et sœurs de la diaspora sont activement engagés dans le processus », a déclaré le nouveau titulaire de la Villa d’Accueil.
Parmi les invités figuraient le maire Alix Desulmé, la vice-maire Mary Estimé-Irvin de North Miami, Priston Jean-Glaude, président de l’Haitian American Chamber of Commerce of Florida (HACCOF), Gepsie Morisset-Metellus, directrice exécutive du Haitian Neighborhood Center Sant La, et Linda Julien, commissaire de la ville de Miami Gardens. Plusieurs figures importantes, comme Marleine Bastien (commissaire du comté de Miami-Dade) et Sheila Cherfilus-McCormick (députée au Congrès américain), étaient absentes. Certains observateurs attribuent l’absence de Bastien à des tensions avec Wilson depuis les élections du commissaire du district 2 du comté de Miami-Dade, où la députée avait pris position en faveur de son rival, l’ancien maire de North Miami, Philippe Bien-Aimé.
Bien que Conille ne s’est pas adressé à la presse après la réunion, la députée Wilson, très proche de la communauté haïtienne, a déclaré aux journalistes : « Nous voulons nous assurer que cette mission est dirigée par des Haïtiens. C’est ce que le peuple haïtien exige. Ils l’ont demandé et l’ont clairement fait comprendre au gouvernement fédéral. Le gouvernement essaie donc de leur donner de l’espace pour le faire. C’est notre mission aujourd’hui. »
Wilson a également abordé le statut de protection temporaire accordé à certains migrants haïtiens aux États-Unis et a mentionné sa liste de demandes pour l’administration Biden, incluant des stratégies pour lutter contre les gangs en Haïti. « Nous avons parlé de prévention ; nous avons été surpris de découvrir que 50 % à 70 % des membres des gangs sont de petits garçons », a-t-elle révélé. « Ce ne sont pas des hommes adultes comme nous le voyons. »
Wilson a souligné ses efforts pour maintenir Haïti « sur le radar » de la Maison-Blanche et a plaidé pour un financement accru afin de soutenir la transition d’Haïti. « Nous nous battons toujours pour Haïti », a-t-elle affirmé, ajoutant qu’elle prévoit de se rendre en Haïti entre août et septembre et a invité les dirigeants haïtiano-américains et les législateurs américains à se joindre à elle.
Notons, qu’au cours de la réunion, Mary Estimé-Irvin, vice-mairesse de North Miami et proche de la congresswoman Cherfilus-McCormick, a pris la parole pour faire le point sur un plan nommé d’après le leader de l’indépendance haïtienne Toussaint Louverture. Ce plan est décrit sur le site web de Cherfilus-McCormick comme un « programme de développement de 50 milliards de dollars sur 10 ans pour reconstruire Haïti, stabiliser le pays, renforcer les institutions démocratiques et judiciaires, investir dans les infrastructures critiques et stimuler la croissance économique… ». Cette intervention n’a apparemment pas plu à la députée afro-américaine Frederica Wilson, à en juger par ses expressions faciales.