Les Sénégalais l’ont fait, pourquoi pas nous?

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Par Stéphane Boudin

Le Sénégal vient de sortir d’une profonde crise institutionnelle qui aurait pu le plonger dans le chaos. Heureusement pour le pays de Léopold Sédar Senghor, la sagesse de ses dirigeants et de sa population a permis d’aboutir à un renouveau démocratique en douceur avec l’élection de Bassirou Diomaye Faye. Ce chapitre de l’histoire politique sénégalaise illustre non seulement la résilience d’un peuple, mais aussi les capacités d’une nation à redéfinir son avenir à travers le prisme de la démocratie.

On peut dire que le Sénégal revient de loin, puisque le contexte pré-électoral était marqué par une profonde défiance envers l’administration sortante. Le mandat de Macky Sall, bien que marqué par des tentatives de modernisation de l’économie du pays, fut également perçu comme une période d’entorse aux principes démocratiques, notamment avec l’accusation d’instrumentalisation de la justice. L’arrestation d’Ousmane Sonko, figure de proue de l’opposition, sur des charges controversées, avait exacerbé les tensions, provoquant des affrontements violents entre ses partisans et les forces de l’ordre.

Dans ce climat de contestation, la décision du gouvernement de reporter les élections initialement prévues pour février dernier a été vue comme une provocation de trop. Cette décision a catalysé une mobilisation sans précédent de divers secteurs de la société civile, appelant à plus de transparence et au respect du calendrier électoral. La jeunesse sénégalaise, en particulier, a joué un rôle déterminant, utilisant les réseaux sociaux pour organiser des manifestations et sensibiliser à la nécessité de changements politiques. Finalement, le Président sortant Macky Sall, débouté par le Conseil constitutionnel, finit par plier en organisant au plus vite des élections transparentes qui ont vu la victoire surprise de Diomaye Faye que personne n’attendait. Et c’est là toute la beauté de la démocratie!

L’élection de Diomaye Faye, dans ce contexte, ne fut pas seulement un changement de leadership, mais aussi un symbole puissant du désir de réforme et de renouvellement. Malgré son emprisonnement juste avant les élections, sa campagne a su capter l’aspiration de la population à une gouvernance équitable et représentative. Son discours axé sur la lutte contre la corruption, la redéfinition des relations économiques du pays et la promotion d’une souveraineté plus affirmée a trouvé un écho favorable auprès d’un électorat en quête d’alternatives et de justice.

Le jour du scrutin, le déroulement des élections a été observé de près, tant au niveau national qu’international. La transparence du processus électoral, ainsi que la rapidité avec laquelle les résultats ont été acceptés par les candidats malheureux, ont marqué un tournant. Cela a démontré une maturité politique et un engagement envers les principes démocratiques qui avaient été mis à rude épreuve.

Aujourd’hui, alors que Bassirou Diomaye Faye prend les rênes du pays, le Sénégal se remet à rêver d’un futur prospère. Et c’est mérité! Les défis sont certes immenses, notamment en termes de réconciliation nationale, de réformes économiques et de lutte contre les inégalités, mais au moins, le peuple a eu le choix de placer à la tête du pays l’équipe qu’il considère la plus apte pour relever ces défis.

Le cas du Sénégal, qui vient de réussir à surmonter une crise institutionnelle par un processus électoral transparent et inclusif, offre des leçons précieuses pour notre pays Haïti, en proie à des défis politiques et sociaux de longue date. À l’instar du Sénégal, Haïti pourrait envisager des mécanismes qui renforcent la confiance du public dans ses institutions démocratiques et qui favorisent une participation plus large de la population dans les processus politiques.

Le Sénégal a démontré l’importance d’une justice perçue comme indépendante et équitable, notamment en gérant des cas sensibles comme celui de Ousmane Sonko, qui, bien que controversé, a pu voir son allié Diomaye Faye se présenter aux élections. Pour Haïti, où les accusations de corruption et les interférences politiques dans le système judiciaire sont monnaie courante, s’inspirer de ce modèle pourrait être un premier pas vers la restauration de la confiance dans les institutions.

De même, le Sénégal a bénéficié de la mobilisation de sa jeunesse, qui a activement participé aux débats et aux manifestations pré-électorales, soulignant l’importance de l’engagement civique. Haïti, avec une population également jeune et dynamique, pourrait tirer parti de cette énergie en impliquant davantage les jeunes dans les dialogues politiques et en leur offrant des plateformes pour exprimer et défendre leurs intérêts.

La campagne de Faye au Sénégal a également mis en lumière l’efficacité des alliances politiques stratégiques et de l’adoption de plateformes de campagne qui répondent directement aux besoins des électeurs. Pour Haïti, il faut qu’on commence aussi à développer des stratégies de campagne qui ne se contentent pas de critiquer le statu quo, mais qui proposent des solutions concrètes aux problèmes économiques, à l’injustice et à l’insécurité.

Haïti, dont les élections ont souvent été entachées d’accusations de fraude et de manipulation, doit clairement travailler à renforcer l’intégrité de son processus électoral. Cela pourrait inclure des réformes telles que l’amélioration de la réglementation des campagnes électorales, le renforcement des observateurs nationaux et internationaux (ex: CARICOM), et l’assurance que tous les partis politiques peuvent concourir sur un pied d’égalité, mais surtout, qu’ils respectent les règles du jeu.

Le modèle sénégalais de résolution de crise offre à Haïti non seulement un exemple de ce qui est possible, mais aussi des pistes concrètes pour envisager une sortie de crise. En s’inspirant des leçons du Sénégal, Haïti pourrait faire un pas significatif vers la stabilisation politique et le renforcement de sa démocratie. Nos politiciens devraient effectuer un voyage d’initiation au Sénégal pour apprendre ce que le mot démocratie signifie vraiment, plutôt que de se perdre en discours démagogiques qui ont contribué à notre déclin.

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