Par Rodney Antoine Ferdinand
(Port-au-Prince) — La situation sécuritaire précaire et prolongée qui paralyse la région métropolitaine de Port-au-Prince met en lumière une opportunité stratégique inédite : le désenclavement aérien de la capitale à travers le développement accéléré des aéroports régionaux. Face aux défis logistiques et aux incertitudes pesant sur la reprise des vols à l’aéroport international Toussaint Louverture, les autorités haïtiennes misent désormais sur l’expansion des infrastructures aéroportuaires du Cap-Haïtien et, surtout, des Cayes.
Lors d’une intervention sur les ondes de Radio Métropole, le ministre des Travaux Publics, Transports et Communications (TPTC), M. Raphaël Austi, a souligné que cette initiative s’inscrit dans un plan d’envergure visant à renforcer la connectivité du pays avec le reste du monde. « Dès le début de l’année, le coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) a mis en avant l’importance du développement des infrastructures portuaires et aéroportuaires du Sud », a-t-il déclaré, insistant sur l’urgence de diversifier les points d’entrée et de sortie du territoire.
La relance et l’expansion de l’aéroport Antoine-Simon des Cayes apparaissent ainsi comme une solution pragmatique aux restrictions opérationnelles pesant sur l’aéroport Toussaint Louverture de la capitale. Le gouvernement, en collaboration avec l’Office National de l’Aviation Civile (OFNAC) et l’Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN), accélère les démarches pour le lancement des travaux dès ce mois de mars 2025.
Une Infrastructure Aérienne de Classe Internationale
Contrairement aux précédentes tentatives de modernisation aéroportuaire, cette initiative vise une transformation profonde et durable. Le ministre Austi a précisé que l’agrandissement de l’aéroport des Cayes inclura une extension majeure de la piste pour atteindre 3 000 mètres de long et 45 mètres de large, permettant ainsi l’atterrissage de gros porteurs tels que des Boeing 747. Outre l’allongement de la piste, le projet prévoit également la construction de nouveaux bâtiments destinés aux agences étatiques, dont l’AAN, la Douane, le Service d’Immigration, la Police Nationale et le ministère de la Santé.
Cette modernisation pourrait profondément modifier le paysage du transport aérien en Haïti. Une fois achevé, l’aéroport des Cayes deviendra une porte d’entrée privilégiée pour la diaspora haïtienne, notamment celle résidant au Brésil, en Argentine et au Chili, leur offrant une alternative aux itinéraires traditionnels via d’autres pays. L’initiative vise aussi à réduire considérablement les coûts de voyage et à offrir une alternative plus accessible aux Haïtiens du Sud et du département de l’Ouest.
Un Choix Stratégique Face aux Incertitudes Sécuritaires
L’incapacité du gouvernement à garantir une reprise imminente des vols commerciaux à Port-au-Prince résulte en grande partie de facteurs hors de son contrôle. En effet, les compagnies aériennes, avant de reprendre leurs opérations, doivent obtenir le feu vert de leurs assureurs, une procédure incertaine tant que la situation sécuritaire demeure critique. À l’inverse, l’aéroport des Cayes, étant sous le contrôle effectif des autorités étatiques, constitue une alternative plus viable et sécurisée.
Les autorités affichent une ferme détermination à mener à bien cette transformation dès que les fonds alloués par la Banque Interaméricaine de Développement seront disponibles. Bien qu’aucun échéancier précis n’ait encore été communiqué, des informations circulent quant à un achèvement des travaux essentiels d’ici la fin de l’année.
Le projet d’expansion des infrastructures aéroportuaires s’impose donc comme une réponse pragmatique et visionnaire aux défis actuels du pays. Loin d’être une simple alternative temporaire, il représente une véritable opportunité de repenser la connectivité aérienne nationale et d’assurer un accès plus large et plus résilient au territoire haïtien.
