PORT-AU-PRINCE, Haïti – Le premier ministre haïtien Gary Conille a abruptement démissionné, vendredi 24 février 2012 au matin, près de cinq mois après son arrivée en poste, un important revers pour le président Michel Martelly.

Le gouvernement a annoncé la démission de Conille dans un bref communiqué et Martelly s’adressera à la nation dans un direct, discours télévisé plus tard vers les 7h PM (Heure locale), le même vendredi.

” Je me sens obligé de vous présenter ma démission comme Premier Ministre du gouvernement de la République d’Haïti “, a écrit Conille dans une lettre datée à la main qui a été adressée au président. ” Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l’assurance de mes sentiments patriotiques. “

La démission du premier ministre pourrait ouvrir la voie à une nouvelle période d’instabilité politique en Haïti. Depuis plusieurs semaines, des tensions entre M.Conille et le président de la république rythmaient la vie politique en Haïti. C’est sous la pression non déguisées du président Martelly et de ses proches conseillers que Garry Conille est contraint de quitter ses fonctions.

Ce retrait à la Primature représente plus particulièrement un nouvelle menace pour la reconstruction de la capitale après le séisme dévastateur de janvier 2010.

” Il est clair, c’est une autre crise, une autre blessure auto-infligée que les dommages de la capacité du gouvernement haïtien à surmonter les défis énormes “, a déclaré Mark Schneider, vice-président senior et expert en Haïti avec Nonprofit Think tank International Crisis Group in Washington, D.C.

L’absence de la personne en charge des opérations du gouvernement au jour le jour pourrait dissuader les donateurs de remplir les promesses pour aider Haïti à reconstruire le pays après le séisme, en outre le blocage des efforts de la reconstruction. Il pourrait aussi mettre un certain nombre de contrats de reconstruction en attente et de reporter encore la nomination des postes gouvernementaux importants qu’Haïti a désespérément besoin pour remplir, dit Schneider.

Les donateurs ont promis 4,5 milliards $US pour la reconstruction, mais seulement la moitié de cette somme a été effectivement versée jusqu’à maintenant, selon le bureau de l’émissaire spécial de l’ONU en Haïti.

Pour sa part, le président du Sénat d’Haïti, Simon Dieuseul Desras, a averti que la perte du premier ministre serait de créer à un vide politique.

” Aujourd’hui, c’est une perte de temps. Nous devons tout recommencer à zéro et nous ne savons pas combien de temps il faudra pour avoir un autre Premier ministre à nouveau “, a déclaré Desras à l’Associated Press au Parlement.

Au moins trois candidats étaient pressentis pour remplacer Dr. Conille (le ministre des Affaires étrangères, Laurent Lamothe, le ministre de l’Intérieur, des collectivités territoriales et de la défense, Me. Thierry Mayard Paul, et la directrice de la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti, Ann-Valerie Milfort), selon un responsable du gouvernement ayant requis l’anonymat.

La nomination de Gary Conille, un médecin qui a déjà été un proche collaborateur de l’ancien président américain Bill Clinton en tant qu’émissaire spécial de l’ONU en Haïti, a été ratifiée par le Parlement haïtien en octobre 2011, après que les deux premiers candidats choisis par le président Martelly eurent été rejetés par les élus.

La démission de Gary Conille pourrait avoir été en partie provoquée par une dispute au sein des responsables gouvernementaux sur la double nationalité de certains d’entre eux, interdite par la Constitution haïtienne pour les personnes occupant de hautes fonctions politiques. Le président serait aussi détenteur de passeports américain et italien.

La démission de Gary Conille pourrait avoir été en partie provoquée par une dispute au sein des responsables gouvernementaux sur la double nationalité de certains d’entre eux, interdite par la Constitution haïtienne pour les personnes occupant de hautes fonctions politiques. Le président serait aussi détenteur de passeports américain et italien.

La perte d’autorité du Premier ministre envers ses ministres s’était accentuée depuis le début de l’année. Elle avait éclaté au grand jour lorsque le Sénat avait lancé une enquête sur la nationalité des membres du gouvernement. Garry Conille avait été le seul ministre à répondre à la convocation des parlementaires. D’autres responsables lui avaient par la suite emboîté le pas pour remettre leur passeport et d’autres documents à la commission de parlemanetaires.

La soirée du mercredi 1er février, le président Michel Martelly avait brutalement interrompu une réunion des parlementaires du GRP et du Dr. Gary Conille ; réunion organisée en la résidence privée du Premier ministre.

Le chef de l’Etat s’en était pris aux participants à cette réunion, et les a accusés d’ourdir un complot contre lui. Même le sénateur Steven Benoit, absent de cette rencontre, avait eu sa part d’admonestation.

Les sénateurs et députés du GPR se sentaient très vexées des propos tenus à leur endroit par le chef de l’Etat ; mortification pareille ressentie par le Premier ministre qui a été menacé par M. Martelly.

Cette réunion perturbée le président Martelly était organisée dans l’objectif principal de jauger avec Gary Conille les projets annoncés dans sa déclaration de politique générale et les actions déjà initiées par son gouvernement, ont assuré des parlementaires qui y étaient présents.

Médecin et ancien diplomate au sein des Nations unies, il venait de lancer une enquête sur les contrats passés par l’Etat haïtien à la suite du séisme de janvier 2010.

En remettant sa démission, Garry Conille a mis un terme à la difficile collaboration qu’il entretenait avec le chef de l’Etat Michel Martelly.

La semaine dernière, en marge d’une conférence de presse, Gary Conille avait déclaré à l’Associated Press que M. Martelly et lui étaient en bons termes malgré des rumeurs affirmant le contraire.

“J’ai une bonne relation de travail avec le président”, a-t-il dit. “Haïti est un grand pays de rumeurs. Je pense que nous avons une relation très franche et honnête dans laquelle nous pouvons discuter. Je crois que certaines personnes, parfois, ont intérêt à créer des distances entre les membres du gouvernement. (…) Je pense qu’il s’agit fondamentalement de rumeurs.”

Conille, le médecin qui a déjà servi en tant qu’aide à Bill Clinton, l’ancien président américain comme envoyé de l’ONU en Haïti, a été ratifiée par l’opposition dominée du Parlement en Octobre 2011, après les deux choix précédents de Martelly au poste de Premier ministre n’eurent pas été ratifiés, ce qui avait retardé la formation d’un gouvernement d’environ cinq mois.

Des signes Annonciateurs

Commentant cette démission, le Sénateur Kely Bastien a déclaré qu’il voyait des signes de division entre Conille et son gouvernement la semaine dernière lorsque le numéro deux est allé devant le Parlement pour répondre aux questions des législateurs au sujet de la double nationalité, mais ne s’est pas présenté avec son cabinet tout entier.

” Conille n’a pas de contrôle sur son gouvernement, et c’est pourquoi il a démissionné, ” estime Bastien.

Même si Conille a dit qu’il était en bons termes avec le président Martelly et les membres de son cabinet, des diplomates étrangers ont suscité des inquiétudes qu’il était en désaccord avec les autres branches du gouvernement.

Mariano Fernandez, le chef de la MINUSTAH, a publié une déclaration en notant une ” série de crises à répétition entre les pouvoirs exécutif et législatif qui minent le bon fonctionnement des institutions et le processus démocratique. ”

” L’impasse politique et la paralysie institutionnelle entre le Gouvernement, le Parlement et le Président ne reflète pas les engagements qu’ils ont pris vis-à-vis du peuple haïtien et ne sont pas probable “, pour aider l’économie en difficulté en Haïti, écrit Fernandez, qui est le représentant spécial du Secrétaire général.

De son côté, l’ambassade américaine à Port-au-Prince a déclaré dit ” regretter qu’Haïti perd le service de Conille comme Premier ministre “, en citant une démonstration qu’il se consacre à l’amélioration des conditions de vie pour Haïti.

Rejoints par le Canada et la France (des pays amis), les Etats-Unis soulignent la nécessité pour le président Martelly et le Parlement à travailler ensemble pour nommer rapidement et approuver un nouveau Premier ministre.

Martelly désigne Laurent Lamothe Premier ministre 

Comme promis, le 56è président d’Haïti n’a pas tardé à communiquer le nom de l’éventuel remplaçant du PM démissionaire, qui n’aura occupé le poste que quatre mois. Martelly a officiellement désigné (jeudi matin 1er mars) Laurent Lamothe, 39 ans, actuel ministre des Affaires étrangères, pour mener le gouvernement. Un choix qui doit encore être ratifié auprès des députés et sénateurs.

Par ce geste, fait-on remarquer, le président de la République veut montrer qu’Haïti ne subit pas une nouvelle crise politique, que le gouvernement va reprendre au plus vite son cadre normal de travail.

La nouvelle a été confirmée par le concerné. Né à Port-au-Prince le 14 août 1972, Laurent Lamothe a étudié en Haïti et aux Etats-Unis. Il est licencié en sciences politiques à l’Université Barry et a obtenu une Maitrise en gestion des affaires à l’Université Saint-Thomas. M. Lamothe a fondé Global voice une organisation qui développe les technomogies de communications en Afrique notamment.

Le choix de Laurent Lamothe n’est pas une surprise : il a été aux côtés de Michel Martelly depuis le début de sa campagne présidentielle et toujours été perçu comme le principal argentier du candidat de Repons Payzan durant la période électorale.

Ami proche du chef de l’Etat, il a fait carrière dans le secteur privé des télécommunications. Figure clé dans l’équipe présidentielle, Laurent Lamothe pourrait donc prendre la tête du gouvernement si les parlementaires acceptent sa candidature.

Le vote va se tenir dans un contexte délicat : les sénateurs enquêtent sur l’éventuelle double nationalité de Michel Martelly qui, de son côté, refuse de présenter son passeport.

Nombreux sont les analystes politiques qui croient que ces tensions entre les pouvoirs exécutif et législatif vont alimenter les débats et donc ralentir le processus de ratification du Premier ministre.

Le Floridien avec les agences

Mis à jour le 4 mars 2012

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