La nouvelle du décès de Claudette Pinede le 24 janvier dernier s’est répandue comme une traînée de poudre au sein de la communauté haïtienne de Floride. Partie à l’âge de 81 ans, cette dame au grand cœur va laisser un immense vide qu’il sera difficile de combler. Car Claudette Pinede, c’était avant tout l’incarnation de l’humanisme, de l’empathie et de la bonté à l’état pur. Des valeurs qui malheureusement se font de plus en plus rares pour laisser place au matérialisme froid.

Claudette Pinede est née à Port-au-Prince juste au moment où la Deuxième Guerre mondiale embrasait le monde. Son père, Vaugirard Pierre-Noël, était un éditeur et un rédacteur en chef respecté dans son milieu.

Déjà petite, Claudette était brillante à l’école. Après avoir obtenu haut la main un diplôme à l’Université d’État en chimie et sciences, elle décroche une bourse d’excellence accordée par le gouvernement français pour fréquenter l’école nationale supérieure de biologie et biochimie de Paris. C’est là qu’elle fait la connaissance d’Edouard Pinede qui deviendra par la suite son mari et dont elle gardera le nom tout au long de sa vie.

De retour en Haïti, le couple Pinede qui a désormais deux enfants se retrouve confronté à la brutalité du régime Duvalier. Afin de protéger leurs deux enfants Nadine et Didier Édouard, la petite famille décide de faire ses valises pour aller s’installer au Canada, plus précisément à Montréal-Nord, région connue pour abriter une importante communauté haïtienne. Là, Claudette ne chôme pas et s’empresse d’obtenir un certificat d’enseignante, ce qui lui permettra d’enseigner la chimie à l’école Pie IX. Par la suite, elle va suivre son mari en Ontario, province anglophone où elle s’initie à la langue anglaise avec sa mère Laura qui l’accompagne.

Quelques années plus tard, les Pinede traversent la frontière pour s’installer aux États-Unis, plus précisément au Connecticut où Claudette va enseigner la biologie dans le prestigieux établissement Convent of the Sacred heart. Elle en profite pour approfondir ses connaissances académiques en décrochant une maîtrise en biologie. Malheureusement, ce parcours quasi parfait sera perturbé pendant un moment par son divorce avec Édouard. Suite à cela, elle part s’installer en Floride où elle retrouve la plus forte communauté haïtienne en Amérique du Nord. Se sentant comme un poisson dans l’eau, Claudette s’épanouit à nouveau. Elle commence à enseigner les sciences et la chimie aux élèves à risque, avant de suivre elle-même une formation pour mieux s’engager dans le social. Si Claudette Pinede a toujours œuvré pour transmettre le savoir, elle avait à cœur d’enseigner aux enfants issus de milieux défavorisés afin qu’ils puissent eux aussi bénéficier d’un enseignement de qualité.

Ses élèves disent d’ailleurs d’elle que son caractère strict en classe ne l’empêchait pas d’être chaleureuse et accessible en privé. Elle répondait toujours présente lorsqu’il s’agissait de donner un coup de main et ne portait jamais de jugement déplacé sur autrui. Lors du passage de l’ouragan Andrew, et bien que sa maison soit fortement endommagée, Claudette Pinede a continué à aider sa communauté. Ce dévouement qui force l’admiration lui a d’ailleurs valu le prix Hurricane Hero’s Award qui lui fut décerné par le gouverneur Lawton Chiles.

Tête bien faite et toujours active, Claudette Pinede ne voyait pas la retraite comme une période de liberté et de repos. Bien au contraire. Elle a ainsi continué à venir en aide aux autres, notamment en faisant du bénévolat au sein du programme Serving Health Insurance Needs of Elders (SHINE) où elle conseillait les personnes âgées sur un grand nombre de sujets, notamment comme l’assurance maladie. Les Haïtiens qui ne parlent pas bien anglais ont eux aussi été nombreux à bénéficier de son aide. Tous ces efforts de Mme Pinede furent reconnus par la chambre des représentants de Floride.

Démocrate, fervente chrétienne et fortement attachée à sa communauté, Claudette Pinede avait des points cardinaux auxquels elle était attachée. Aujourd’hui, les Haïtiens de Floride pleurent une femme au cœur plein d’amour et de bonté. Pour ses funérailles, sa famille demande, au lieu d’envoyer des fleurs, de faire des dons pour créer des bourses à son nom en faveur de filles haïtiennes passionnées par les sciences et les mathématiques. Les dons peuvent être versés au https://uhelp.net . Comme quoi, même après sa mort, Claudette Pinede continue à faire du bien. De là-haut, elle sera sans doute fière de voir ses ‘’enfants’’ – dans le sens large du terme – reprendre le flambeau.

D. Ferdinand / LE FLORIDIEEN

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