Alors que nous venons de célébrer le 8 mars dernier la journée internationale de la femme, l’occasion nous est donnée de rendre hommage à la femme haïtienne qui s’est tant sacrifiée pour aider Haïti à avancer, surtout en ces moments difficiles. Le rôle des femmes dans la société est souvent négligé et non reconnu à sa juste valeur. Cela ne vaut pas seulement pour les Haïtiennes, mais pour les femmes du monde entier qui sont souvent victimes de préjugés, d’injustices et d’abus divers.

La femme haïtienne, colonne vertébrale du pays

Depuis l’indépendance d’Haïti en 1804, les femmes ont toujours joué un rôle clé dans l’histoire tumultueuse de notre pays. Dès le début, elles se sont levées pour prendre leur place dans la société haïtienne, souvent en défiant les normes sociales strictes de l’époque.

Au cours des siècles, la femme haïtienne n’a cessé de lutter pour la liberté, la justice et l’égalité. Elle a été combattante, cheffe de file politique, artiste inspirante, et bien plus encore. On peut dire sans tomber dans l’exagération que la femme haïtienne a marqué son pays d’une empreinte indélébile.

Déjà contre les Français, les femmes ont joué un rôle crucial dans la guerre de l’indépendance, combattant aux côtés des hommes pour renverser le régime colonial.

Un exemple parmi d’autres, Sanité Bélair (de son vrai nom Suzanne Bélair), sœur de l’un des chefs de la révolution, a conduit des groupes de soldats dans des batailles importantes. Elle a également fourni un soutien logistique et matériel aux combattants en leur procurant de la nourriture, des soins de santé et des munitions.

Dans les années qui ont suivi l’indépendance, les femmes ont continué à jouer un rôle de premier plan dans la société haïtienne. Elles ont fondé des organisations pour aider les pauvres et ouvert des écoles et des cliniques pour améliorer la vie des communautés locales.

Au XXe siècle, les femmes haïtiennes ont été à l’avant-garde de la lutte pour la justice et l’égalité. Nombreuses sont les figures iconiques comme la militante Yvonne Hakim-Rimpel qui ont œuvré pour faire avancer notre société vers l’avant, notamment en défendant les droits des femmes et des enfants. On retrouve également les femmes au premier rang pour protéger les droits civils et politiques, comme lors de la révolte de 1986 contre le régime dictatorial de Jean-Claude Duvalier.

Mais malgré tout cela, le rôle de la femme haïtienne n’est pas assez valorisé par la société qui ne récompense pas, voire parfois ne reconnaît même pas ses contributions et ses sacrifices.

La femme haïtienne reste marginalisée par la société

Les femmes représentent près de la moitié de la population haïtienne. Cependant, malgré leur contribution énorme, elles sont souvent marginalisées et leur travail invisible reste largement ignoré, ou même dénigré.

Les femmes ont conquis des sommets et ont démontré leur capacité à être des leaders exceptionnels dans la politique, les affaires, la science, la technologie et bien d’autres domaines. Pourtant, leur rôle dans la société est souvent considéré comme secondaire.

Les femmes haïtiennes ont toujours travaillé dur pour contribuer à la croissance et au développement de notre pays. Elles ont été des mères aimantes, des enseignantes dévouées, des infirmières compétentes et des travailleuses acharnées dans les usines. Une cheville ouvrière dont la contribution dans le domaine économique, social et culturel est énorme.

Les femmes effectuent souvent des tâches non rémunérées, telles que les soins aux enfants, aux malades et aux personnes âgées, ainsi que les tâches ménagères. Leur travail ‘silencieux’ est crucial pour le bon fonctionnement de la société, mais il est souvent ignoré et considéré comme une simple responsabilité féminine. En d’autres termes, la femme fait ce qu’elle a à faire, c’est naturel!

En plus de cela, les femmes sont souvent victimes de discriminations et de violences. Le harcèlement sexuel, les violences domestiques et l’inégalité des salaires sont des problèmes persistants qui entravent leur épanouissement. Malgré les progrès importants accomplis, les femmes sont toujours en retard par rapport aux hommes en termes d’égalité des chances.

Il est grand temps que la société prenne en compte le rôle essentiel des femmes et leur contribution à la croissance et au développement de notre société. Elles doivent également avoir les mêmes opportunités que les hommes dans tous les domaines, notamment au niveau de l’emploi, de l’accès à des postes à responsabilité, et des salaires. Ce phénomène de discrimination ne touche pas seulement Haïti, mais également des pays dits développés comme les États-Unis, la France ou le Royaume-Uni.

Malgré les difficultés, la femme haïtienne ne renonce jamais

La récente qualification des Grenadières à la prochaine Coupe du Monde de Football résume bien le caractère courageux et résilient de la femme haïtienne. Malgré le manque de moyens, malgré une fédération dirigée par des hommes qui sont loin d’être irréprochables sur le plan éthique, à l’image de l’ancien Président exclu à vie pour des agressions sexuelles sur de jeunes innocentes, malgré une situation sécuritaire et économique particulièrement compliquée dans notre pays, nos jeunes et valeureuses joueuses sont arrivées à surmonter toutes ces difficultés pour décrocher haut la main le ticket qualificatif.

S’il y’a une leçon à retenir du parcours héroïque de nos joueuses, c’est que les femmes haïtiennes n’abandonnent jamais, quoiqu’il arrive. Malgré les défis et les obstacles, elles ont toujours réussi à faire progresser les droits des femmes et ont remporté des victoires importantes dans des domaines tels que l’éducation, la santé et la participation politique.

Alors que nous sommes dirigés aujourd’hui par des incompétents notoires, choisir des femmes pour occuper des postes à responsabilité serait une bonne alternative pour sortir notre pays du chaos. Le meilleur exemple est celui de Michael Jean qui est venue secourir le football haïtien et lui redonner un nouveau souffle. Les résultats ne se sont pas fait attendre avec la qualification historique des Grenadières et les résultats très encourageants de leurs homologues masculins dans les dernières compétitions.

Par expérience, on sait que les femmes politiques ont souvent dû faire face à des difficultés plus importantes pour atteindre des postes de leadership. En conséquence, elles peuvent avoir dû travailler plus dur, faire preuve de plus de détermination et de persévérance, ce qui peut les rendre plus résilientes et plus matures dans leur leadership.
Aussi, on peut dire que les femmes sont souvent plus attentives aux besoins de leur communauté, en particulier ceux des femmes et des enfants, qui sont souvent négligés par les politiques publiques. Elles peuvent donc être plus responsables et plus enclines à mettre en place des mesures qui répondent aux besoins de tous les membres de la société.

Il est vrai que les femmes sont par nature plus enclines à rechercher le consensus et à travailler en collaboration, plutôt qu’à chercher à imposer leur point de vue de manière autoritaire, comme c’est le cas avec feu Jovenel Moïse, ou actuellement avec son successeur Ariel Henry. Cette approche peut conduire à des politiques plus inclusives et plus durables, car elle implique une écoute attentive de tous les points de vue et une recherche de solutions qui fonctionnent pour tous. Étant souvent confrontée à une plus grande pression pour prouver ses compétences et sa légitimité, la femme est amenée, par choix ou par nécessité, à adopter une approche réfléchie et prudente dans la prise de décision.

L’avenir d’Haïti est inextricablement lié à la participation active et à la pleine reconnaissance du rôle essentiel de la femme haïtienne dans la transformation de la société. On a coutume de dire que ‘’Fanm se poto mitan kay la’’. Or, notre maison c’est Haïti. Et sans la femme, la maison ne pourra pas tenir debout bien longtemps. À bon entendeur!

Dessalines Ferdinand
Le Floridien, 15 mars 2023

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