(LE FLORIDIEN) — C’est une lettre de démission cinglante que Daniel Foote a fait parvenir au secrétaire d’État Antony Blinken. L’envoyé spécial en Haïti, qui n’était en poste que depuis deux mois – suite à l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse – accuse le chef de la diplomatie américaine d’avoir « ignoré ses recommandations ».
L’émissaire américain en Haïti Daniel Foote a démissionné, dénonçant les expulsions «inhumaines» par les Etats-Unis de milliers de migrants haïtiens alors que le pays est en proie à l’insécurité grandissante des gangs armés.
« Je ne serai pas associé à la décision inhumaine et contre-productive des États-Unis d’expulser des milliers de réfugiés et d’immigrants clandestins vers Haïti », écrit Daniel Foote. Un pays, ajoute-t-il, « où les officiels Américains sont confinés dans des complexes sécurisés en raison du danger posé par les gangs armés ». Selon Daniel Foote, Haïti n’est pas en mesure d’absorber cette arrivée « forcée », de milliers de migrants qui « manquent de nourriture, d’un abri et d’argent ».
Plus inédit encore, il condamne l’ingérence des États-Unis dans la politique haïtienne et, récemment, leur soutien renouvelé a l’actuel Premier ministre haïtien par intérim, Ariel Henry. « L’arrogance », écrit Daniel Foot, « qui nous fait croire que nous devrions désigner -encore – le vainqueur est impressionnante ». Une « intervention politique internationale qui a systématiquement produit des résultats catastrophiques ». C’est de mémoire la première fois qu’un haut fonctionnaire américain tient de tels propos sur le dossier haïtien.
La démission de Daniel Foote a été confirmée ce matin par le département d’État. « L’ambassadeur Daniel Foote a remis sa démission en tant qu’envoyé spécial en Haïti. Nous le remercions pour le service qu’il a rendu à son pays et au peuple haïtien », a déclaré le département d’État.
Lors d’une réunion avec des leaders de la communauté haïtienne du sud de Floride – déroulée à ‘Center for Haitian Studies’, Little Haiti le samedi 4 septembre dernier – l’ambassadeur Foote avait d’ailleurs déclaré que « sa condition pour accepter le poste d’envoyé spécial était que les États-Unis ne répéteraient pas les mêmes erreurs en Haïti ».
Les Etats-Unis avaient suspendu les expulsions de migrants haïtiens en situation irrégulière après le séisme qui avait ravagé la moitié sud d’Haïti le 14 août, mais le regroupement en quelques jours de plus de 15 000 migrants, dont une majorité d’Haïtiens, sous un pont au Texas, a changé la donne. Depuis dimanche, les services migratoires américains ont déjà affrété 12 vols pour renvoyer plus de 1400 personnes dont plusieurs centaines d’enfants, dans la capitale Port-au-Prince et Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays.
Daniel Foote avait été nommé le 22 juillet avec pour objectif de «faciliter la paix et la stabilité» et la tenue d’élections «libres et justes» après l’assassinat du président Jovenel Moïse, tué dans sa résidence privée par un commando armé le 7 juillet.