Tout le monde commet des erreurs de jugement. Après tout, l’être humain n’est pas parfait. Mais lorsque tout un peuple vous accorde sa confiance et met son destin entre vos mains, vous vous devez d’être prudent pour éviter tout faux pas pouvant avoir des incidences imprévisibles. Chaque décision prise par un Chef d’État a des répercussions positives ou négatives sur la vie de millions de gens. Jovenel avait-il conscience de cette lourde responsabilité qui lui incombait lorsqu’il a été élu Président de la République en février 2017, rien n’est moins sûr ! Arrivé laborieusement à mi-chemin d’un mandat qu’il n’est même pas certain de terminer, Jovenel est un cas d’école de tout ce qu’un dirigeant ne doit pas faire pour mécontenter la population. Liguer une grande partie des Haïtiens contre lui semble d’ailleurs être la seule chose qu’il ait réussie avec brio durant sa présidence. Retour sur les 10 erreurs les plus marquantes au cours de ses 2 années et 8 mois passés au pouvoir :

1- Des promesses surréalistes : la première erreur, Jovenel l’a commise avant même qu’il ne soit élu Président. En effet, durant la campagne électorale, il a eu l’impudence de promettre plus que ce qu’il ne pouvait donner, à savoir de la nourriture dans chaque assiette et de l’argent dans chaque poche des Haïtiens. Le peuple a cru en ses paroles et a rempli sa part du contrat en portant au pouvoir l’homme de Trou-du-Nord (Nord-est). Ce dernier s’est révélé être un imposteur puisqu’il n’a tenu aucun de ses engagements. Dès lors, le peuple a tout à fait le droit de déclarer le contrat comme étant caduc, nul et non avenu. En d’autres termes, il a le droit de mettre Jovenel à la porte !

2- Atermoiements décisionnels : 4 Premiers ministres en deux ans, c’est un exploit inédit dans l’histoire politique contemporaine du pays. Cela montre le flottement qui règne au plus haut sommet de l’État et l’absence d’un projet politique concret et viable. Le Président semble tâtonner à vue puisqu’il n’a jamais montré aucune cohérence ou continuité dans tous les remaniements qu’il a effectués jusqu’à date. Ce qui fait dire à certains qu’Haïti est devenu comme un bateau sans capitaine qui peut chavirer au moindre coup de vent.

3- Mauvaise communication : disons-le clairement, Jovenel est tout sauf un crack de la communication. Il a toujours autant de mal à convaincre et à faire passer ses messages auprès d’une population de plus en plus méfiante. Malgré qu’il soit entouré par toute une équipe de conseillers en communications qui soignent son image dans les médias, cela ne l’empêche pas de faire quelques gaffes invraisemblables. La plus récente étant son incapacité à dire le nombre exact d’habitants en Haïti. Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 15 octobre, il a avancé le chiffre de 14 millions d’habitants. Une semaine plus tard, le 23 octobre, en répondant à une question d’un confrère de RFI, la population est tout d’un coup passée à 12 millions d’habitants ! 2 millions d’Haïtiens évaporés en 1 semaine ! S’il continue ainsi, le pays va se vider bien avant le réveillon !

4- Naïveté politique : ses difficultés à dialoguer avec le parlement montrent chez Jovenel une certaine inexpérience combinée à de la naïveté politique. Cela fait quelques mois déjà qu’il est incapable de faire accepter un Premier ministre. Or, la politique est un subtil art d’équilibriste entre la persuasion et la négociation que le Président ne semble pas encore maîtriser, ce qui a conduit au blocage institutionnel que nous connaissons aujourd’hui.

5- Gestion de l’affaire Petro-Caribe : c’est le gros dossier qui a entaché la présidence de Jovenel et attisé la colère populaire. Le Président avait là une occasion en or de redorer son blason en mettant en place une commission ad hoc pour faire toute la lumière sur le scandale Petro-Caribe. Le fait de juger les personnes coupables de détournements, de malversations, d’enrichissement illicite et de corruption aurait marqué les esprits et fait remonter la côte de confiance du Président auprès des Haïtiens. Au lieu de cela, Jovenel s’est montré peu enthousiaste à l’idée de régler cette affaire comme il se doit. En voyant son nom ressortir dans le rapport de la Cour supérieure des comptes concernant la mauvaise gestion des fonds Petro-Caribe, on a enfin compris pourquoi le Président avait tout intérêt à enterrer ce dossier brûlant.

6- Nominations hasardeuses : que ça soit les ministres ou les directeurs d’établissements publics, les nominations gérées par Jovenel n’ont pas souvent été judicieuses. Encore une fois, le Président s’est pris au jeu de faire et défaire des personnes au grè de son humeur, faisant fi des qualifications et de l’expérience requises pour mener à bien une mission dans tel ou tel poste. Jovenel croyait, en plaçant certains responsables à des postes clés, qu’il allait gagner leur fidélité et acheter leur loyauté. Mais il s’est mis le doigt dans l’œil, car beaucoup ont fini par se retourner contre lui.

7- Équipe de conseillers mal choisie : le Président ne prend pas toutes les décisions seules. Beaucoup émergent d’éminences grises recrutées à prix d’or et qui pavanent à longueur de journée dans les couloirs et salons feutrés du palais présidentiel. Malheureusement, tout semble montrer que l’équipe de conseillers de Jovenel est loin d’être compétente, aussi bien sur le plan de la politique nationale qu’internationale.

8- Timing aléatoire : Jovenel a le don de prendre certaines mauvaises décisions au mauvais moment. Un exemple parmi tant d’autres, alors que le pays a un besoin urgent de liquidités pour continuer à fonctionner à peu près normalement et importer les denrées de base, à commencer par les carburants, le Président a eu l’idée saugrenue de fâcher son allié vénézuélien qui lui vendait pourtant du pétrole à un prix défiant toute concurrence. Si Jovenel a tourné le dos à Maduro pour ne pas mécontenter Trump, il n’a rien eu en retour de la part de l’impétueux Président américain. Ce qui fait dire aux observateurs que Jovenel a finalement perdu sur les deux tableaux.

9- Entêtement : Le Chef de l’État voit bien que sa côte de popularité auprès des Haïtiens est au plus bas et que ses soutiens politiques se font de plus en plus rares. Au lieu de faire amende honorable et laisser les clés de la maison à quelqu’un d’autre, il continue à se cramponner au pouvoir de manière presque obsessionnelle. L’histoire nous montre que ce genre de comportement finit malheureusement bien souvent par mal se terminer pour le principal protagoniste.

10 – Ne pas comprendre la situation : Jovenel est plus que jamais déconnecté de la réalité du pays. Il ne peut en aucun cas résoudre les problèmes d’Haïti, pour l’unique et simple raison qu’il ne les connaît pas. Si tel était le cas, cela fait longtemps qu’il aurait acquiescé à la volonté du peuple et cédé sa place au lieu de s’agripper à son siège comme il le fait aujourd’hui.

D. Ferdinand/Le Floridien

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