Alors que la Coupe du Monde 2022 qui se tient actuellement au Qatar bat son plein, beaucoup d’Haïtiens regrettent que l’équipe nationale (Les Grenadiers) ne soit pas de la partie. Non pas que notre sélection manque de talents, loin de là, mais la conjoncture actuelle que traverse notre pays ne permet pas à nos joueurs de s’exprimer pleinement sur le terrain. Cela étant, que les amateurs du ballon rond se rassurent! Haïti a toujours été et restera une terre de football, n’en déplaise aux critiques malveillantes. Notre pays possède de grands joueurs qui ont fait le bonheur des Grenadiers, mais aussi d’autres sélections.
Kimpembe, la muraille infranchissable
Commençons par le premier haïtien à avoir gagné une Coupe du Monde. En effet, le soir du 15 juillet 2018 à Moscou, Kimpembe et ses partenaires de l’Équipe de France soulevaient la plus prestigieuse des coupes, deuxième trophée remporté par les tricolores. Certes, Kimpembe a représenté la France, mais il reste très attaché à Haïti, pays d’origine de sa mère. Pour preuve, il fut parmi les premières personnalités à s’engager au lendemain di séisme de 2021, créant un fond spécial pour venir en aide aux sinistrés. Celui que l’on surnomme également ‘colonel’ a montré tout son talent de défenseur central lors de cette compétition, principalement au cours du troisième match de poule.
À 22 ans seulement, il soulevait le Graal dont rêve tout footballeur. Kimpembe fait aussi partie de la charnière centrale du PSG depuis 2004. Devenu indispensable au sein du club parisien, il a la chance de côtoyer les plus grands noms du ballon rond, notamment Neymar, Messi ou encore Mbappe.
Joe Gaetjens, la légende martyre
Si Kimpembe a été le premier haïtien à remporter une Coupe du Monde, Joe Gaetjens fut le premier à y participer. Non pas avec son pays natal, Haïti, mais avec les États-Unis… un pays dont il ne possède même pas la nationalité! Il faut dire qu’à l’époque, la FIFA était peu regardante sur les origines des joueurs. Joe Gaetjens fut donc sélectionné grâce à l’intervention du capitaine de l’époque, un certain Walter Bahr. C’est d’ailleurs ce dernier qui allait délivrer la passe décisive qui permettait à Gaetjens de marquer le but légendaire pour une victoire historique des États-Unis sur l’Angleterre, pays qui a inventé le football. Quelques années plus tard, Gaetjens remet les crampons, mais cette fois avec les Grenadiers (1953) avant de prendre définitivement sa retraite et d’entamer une carrière d’entrepreneur. Malheureusement, il a disparu en 1964 suite à son arrestation par les tontons macoutes qui faisaient régner la terreur à l’époque. Cela n’a pas empêché la fédération américaine de football de le faire entrer dans le Hall of Fame du Soccer en 1976.
Emmanuel Sanon, le patron!
S’il y’a un nom qui fait l’unanimité en Haïti, c’est bien celui d’Emmanuel Sanon. Le natif de Port-au-Prince incarne à lui tout seul la génération dorée du football haïtien qui a participé à la Coupe du Monde de football en Allemagne en 1974. Il reste d’ailleurs à ce jour le meilleur buteur des Grenadiers avec 37 réalisations, en plus d’être le seul joueur haïtien à avoir marqué en Coupe du Monde (1 but contre l’Italie, et 1 contre l’Argentine).
En club, Sanon a fait les beaux jours du club belge de Beerschot où il inscrira pas moins de 43 buts. Par la suite, il s’engage avec les San Diego Sockers avant de prendre sa retraite en 1982. Il entraine brièvement l’équipe nationale en 1999-2000, malheureusement sans pouvoir ramener les Grenadiers à leur niveau d’antan. Ayant élu domicile à Orlando avec sa famille, il succombera en 2008 à un cancer du pancréas à l’âge de 56 ans. Il est le seul footballeur à ce jour à avoir eu des funérailles nationales. Il fut également élevé au grade de commandeur par l’ancien Président René Préval.
Duckens Nazon, The Duck
Nazon est sans conteste le digne héritier de la génération dorée des années 70. Véritable renard des surfaces, celui que l’on surnomme The Duck a le flair des grands buteurs. Son physique robuste, sa vivacité et son sens du placement font de lui un redoutable attaquant craint par toutes les défenses. Bien qu’il possède la nationalité française, Nazon a préféré défendre les couleurs d’Haïti. Bien lui en a pris, car il a pu vivre des moments mémorables avec les Grenadiers. Hauteur de 25 buts avec la sélection nationale en 47 apparitions, il est le joueur le mieux placé pour battre le record de son aîné Sanon. Surtout que The Duck est capable de marquer 5 buts en une seule rencontre, comme il l’a montré lors de la Gold Cup 2018 face à Saint-Martin.
En club, Nazon a évolué dans les plus grands championnats européens (Belgique, France, Angleterre). Sa saison la plus prolifique reste toutefois en 2021 où il a inscrit avec l’US Quevilly-Rouen 15 buts en 36 rencontres.
Jonathan David, l’artiste
Malgré son jeune âge, Jonathan David fait les beaux jours de l’Équipe du Canada qu’il a aidé à qualifier pour la Coupe du Monde 2022 au Qatar. Un exploit puisque les Canadiens n’avaient plus goûté à la joie de cette grande fête footballistique depuis 1986 au Mexique, année où ils étaient sortis par la petite porte en étant éliminés dès le premier tour suite à 3 défaites consécutives, avec 0 but marqué et 5 encaissés. Malheureusement pour le Canada, la Coupe du Monde 2022 s’achève également par une élimination précoce dès le premier tour après deux défaites face à la Belgique (0-1) et la Croatie (1-4).
En club, Jonathan fait les beaux jours du LOSC (Lille) depuis 2020. En 2 ans, il a réussi à inscrire pas moins de 42 buts. Cela justifie pleinement le montant record de son transfert évalué à 27 millions d’euros, soit la plus grande opération dans l’histoire du club nordiste.
Jean-Jacques Pierre, ‘le boucher’
La jeune génération le connaît comme le sélectionneur d’Haïti. Mais avant cela, Jean-Jacques était aussi un grand joueur. Son surnom de boucher dont il a hérité lors de son passage à Nantes vient du fait qu’il joue dur sur l’adversaire et ne fait pas dans la demi-mesure face aux attaquants. Lorsque Jean-Jacques tacle, c’est un bulldozer qui rase tout sur son passage : jambes, crampons, gazon… tout y passe. Un courage et une efficacité appréciés par les supporters haïtiens qui voient en lui un vrai patriote qui n’hésite pas à mouiller le maillot. Il faut dire qu’avec son gabarit (1m80) sculpté dans le marbre, Jean-Jacques impose le respect. Après un passage dans le championnat argentin, le natif de Léogâne atterrit en 2005 à Nantes où il va faire les beaux jours des Canaries. Malgré qu’il soit défenseur, il réussira tout de même à inscrire 5 buts lors de ses 6 années passées dans le championnat français.
Une fois qu’il a raccroché les crampons en 2019, il sera appelé en 2019 par la fédération haïtienne pour prendre les rênes de l’équipe nationale. Il ne réussira malheureusement pas à qualifier les Grenadiers à la Coupe du Monde 2022 vu la situation difficile dans laquelle vit notre pays aujourd’hui. Malgré cela, de par son expérience et son amour pour les Grenadiers, nul doute que Jean-Jacques Pierre saura construire un groupe solide pour les années futures.
D Ferdinand/ Le Floridien, 29 novembre 2022