Après trois années passées au pouvoir, on peut déjà tirer un bilan sur la politique du président Trump et son impact sur le quotidien de la diaspora haïtienne vivant aux États-Unis, particulièrement celle établie en Floride. L’homme en lui-même est un personnage haut en couleur qui ne laisse personne indifférent. Soit on aime, soit on n’aime pas. En 2016, il a défié les sondages en s’imposant contre une Hillary qui se voyait déjà dans la peau de la première femme à accéder au poste suprême. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont.
Le jour d’investiture de Donald Trump le 20 janvier 2017, tous les espoirs étaient permis. Les Américano-Haïtiens voulaient encore croire qu’il allait chambouler l’establishment à Washington et faire entendre les voix des minorités. Après tout, c’était le premier nominé de l’histoire à venir rencontrer personnellement les Haïtiens de Floride pour écouter leurs doléances. Mais ceux qui croyaient aux miracles allaient vite déchanter, car Mr Trump avait d’autres plans pour eux.
Commençant par les points négatifs qui sont malheureusement assez nombreux. À peine arrivé, le nouveau locataire de la Maison-Blanche a commencé par détricoter l’ObamaCare, une loi qui a permis de faire bénéficier à un grand nombre de nos concitoyens d’une couverture santé universelle, surtout les enfants et les personnes démunies. Même si l’abrogation de cette loi ne sera finalement pas votée par le Sénat, Trump passera par le décret présidentiel pour contourner cet obstacle.
Sur le plan migratoire, le projet de Trump est là encore assez clair, symbolisé par le fameux mur qu’il veut construire à la frontière avec le Mexique pour empêcher toute intrusion de migrants venant des pays du Sud. ‘Les pays de merde’ pour reprendre les termes qu’il aurait tenus dans son bureau devant un parterre de sénateurs pour parler d’Haïti, du Honduras et des pays africains. Trump n’est pas du genre à mettre des gants pour dire ce qu’il pense, manquant souvent de tact et ignorant le langage diplomatique que tout chef d’État est censé avoir. Dans bien des cas, sa communication abrupte exacerbe les tensions au lieu de les apaiser. Certains reprochent chez lui une absence d’empathie, quand d’autres estiment ouvertement que c’est un Président raciste et clivant. Il n’est en effet pas rare qu’il tienne des propos blessants ou qui peuvent blesser certaines sensibilités, surtout chez les minorités ethniques. Même son silence parfois dérange, comme lors de l’attaque xénophobe d’un suprématiste blanc à El Paso où il a mis du temps à la condamner, lui qui a pourtant la gâchette facile sur Twitter où il n’hésite pas à étaler ses quatre vérités pour moins que ça.
On ne peut donc que constater avec amertume que Trump et les minorités ethniques, ça fait deux ! Et cela a des répercussions directes sur la diaspora haïtienne puisque le Président entend mettre en place plusieurs mesures en sa défaveur. La première est la radiation d’Haïti de la TPS qui risque de mettre à la porte des milliers d’Haïtiens. La deuxième est le durcissement prévu du regroupement familial qui permettait aux Haïtiens de faire venir leurs proches. Toujours sur le thème migratoire qui risque d’être une nouvelle fois au centre des débats lors des présidentielles, Trump n’a cessé de jouer avec l’avenir des Dreamers, des mineurs sans papiers qui risquent eux aussi l’expulsion, alors que beaucoup sont devenus adultes et n’ont connu d’autre pays que les États-Unis. Trump préfère donc voir des immigrés riches et talentueux, si possible issus de nations occidentales développées comme la Norvège plutôt qu’Haïti, un pays qu’il considère comme trop pauvre. À croire que la pauvreté est un tard qui colle à votre peau toute votre vie.
Du côté des points positifs de la présidence Trump, ils sont plutôt d’ordre économique. La croissance est repartie de plus belle et le chômage n’a jamais été à un niveau aussi bas depuis 1969. De quoi mettre de l’eau dans le moulin des soutiens à Trump. Cela dit, certains experts relativisent en indiquant que Trump ne fait que récolter les fruits des réformes structurelles majeures entreprises par son prédécesseur. La paternité de cette relance économique serait donc à mettre au crédit d’Obama. L’autre point positif de ce mandat est le bras de fer engagé avec la Chine pour résorber un déficit commercial abyssal. Si on peut critiquer la forme avec laquelle Trump s’est attaqué au problème, on ne peut qu’être d’accord avec lui sur le fond. La Chine applique en effet depuis des années des pratiques concurrentielles déloyales, comme le fait de manipuler sa monnaie ou de forcer le transfert technologique.
Toujours sur le plan international, Trump a orienté sa politique étrangère vers un désengagement volontaire de toutes les régions où il y’a des conflits armés ou des troubles sérieux. Cela a desservi Haïti qui a besoin plus que jamais d’une assistante urgente pour soulager les souffrances de sa population. On ne peut que déplorer le manque d’implication de l’administration américaine pour résoudre une crise qui affecte pourtant un pays voisin et ‘ami’. Pour toutes ces raisons, les Haïtiens de Floride sont assez déçus du mandat de Trump en général. Voyons comment cette déception s’exprimera lors des prochaines élections présidentielles. Le rendez-vous est donné pour le 3 novembre 2020.
LE FLORIDIEN