HIGUEY (LF) — Chaque année, le 21 janvier, des milliers de pélerins catholiques se rendent à la basilique d’Higuëy, capitale de la province d’Altagracia (République Dominicaine), située dans la région Est, à 45 minutes des célèbres plages de Bavaro et Punta Cana, pour vénérer Notre Dame d’Altagracia (Nuestra Señora de Altagracia), sainte patronne et protectrice de l’île voisine à Haïti, réputée pour être à l’origine de nombreux miracles.
C’est un élément culturel fondamental sur lequel le peuple dominicain a un consensus depuis plus de 300 ans. Les rituels et célébrations régionales ont pris forme au fil des années et la tradition initiale est maintenue et agrandie.
Cette pratique touche presque tous les habitants et ce lien les connecte en tant que peuple. Si Higuëy est le centre par excellence de la dévotion à Altagracia, toute la République la célèbre, chaque ville et petit bourg à sa façon.
Ils sont venus des 4 coins du pays, d’Haïti et de l’étranger pour se recueillir devant son image sacrée, un tableau qui orne le centre de l’imposante basilique, dressée à l’entrée du centre ville.
Théâtre de la ferveur religieuse du peuple dominicain, la fête de Notre Dame d’Altagracia (la mère de Jésus), est une des nombreuses fêtes patronales en République Dominicaine. Comme toutes les fêtes patronales, la célébration débute plusieurs jours avant la date initiale.
Depuis le weekend avant, ils étaient déjà nombreux (pélérins et petits marchands) à s’installer sur la grande cour de la basilique et aux alentours de l’imposant bâtiment qui ne peut laisser les visiteurs de marbre tant son architecture moderne est originale et imposante. Des vendeurs d’objets religieux associés à l’image de la vierge (tout ce qu’il faut pour nourrir la foi) se sont bien tirés d’affaires toute la semaine. Les gens viennent avec des bougies, des images de la Vierge et des tentes pour dormir dans le grand espace vert bordant le temple emblématique. Des stands de rue, des boutiques apparaissent spontanément pour ravitailler toute cette population à bas prix. Certains en ont profité pour découvrir la ville d’ Higuey et ses attractions touristiques.
Cette année 2012, la fête a connu un énorme succès populaire, puisque ce 21 janvier, jour férié en République Dominicaine, mêlant cultes religieux, danses et chants, tombe un weekend. Ainsi, les gens étaient plus enclin à y participer.
Jeudi l’avant veille de la fête, le nonce apostolique, Jozef Wesolowski, a célébré une messe devant la basilique, où il a demandé à la Vierge d’aider le peuple haïtien à sortir de la situation misérable encore plus atroce dans laquelle il se trouve, après le séisme dévastateur du 12 janvier 2010.
Le prêlat a également demandé à la Vierge Marie de donner la sagesse et la force aux autorités de son pays pour qu’elles gouvernement avec équité et justice.
La journée du samedi 21 janvier, les croyants ont participé à d’impressionnantes processions. Ils se sont recueillis devant l’image sacrée de la Vierge.
Le Président Leonel Fernandez, accompagné de la Première Dame Margarita Cedeño de Fernández, et des membres de son cabinet, ont assisté à la messe officielle célébrée dans une basilique remplie à pleine capacité la matinée du jour J.
Les pélerins sont venus pour différentes raisons : soit pour demander des faveurs en matière de santé ou économiques, soit pour rendre gloire pour les réalisations et même pour des raisons d’amour.
C’est le cas de Patricia qui vit illégalement en République Dominicaine. Elle y était pour demander à la Vierge Altagrace de la protéger contre toute décision du gouvernment dominicain de l’expulser vers Haïti, son pays natal, qu’elle a dû fuir avec ses trois enfants après le tremblement de terre à la recherche de nouveaux horizons dans le pays voisin.
Le jeune Donaldo, qui a fait le voyage de la ville de Ounaminthe avec quatre membres de sa famille, a attendu près d’une demie heure avant de gravir l’estrade pour aller embrasser l’image sacrée de la Vierge d’Altagracia. Une femme venue de Miami avec un groupe d’amis, a assisté, a-t-elle dit, à toutes les messes du samedi 21 janvier, en reconnaissance à la Vierge.
“J’ai connu de nombreuses difficultés l’année 2010… sous les conseils d’un parent j’étais venue ici l’an dernier (2011) pour m’adresser à la Vierge afin qu’elle intercède pour moi auprès de Dieu…. je dois avouer que j’ai reçu toutes sortes de bénédictions spirituelles ces six derniers mois.. voilà pourquoi je suis retournée ici pour témoigner ma gratitude envers ma mère Altagrace “, a raconté la croyante.
Au sein de la basilique et sur la grande cour, la présence haïtienne était perceptible, et la plupart des femmes portaient des vêtements en lambeaux, marchaient pieds nus, s’accrochant à l’image de la Vierge et pria en créole avec une bougie allumée en regardant le ciel, persuadés que leurs demandes seront satisfaites.
Enfin, le lendemain dimanche, une parade a été organisée dans les rues de la ville d’Higuey, avec un défilé de tableaux à l’effigie de la Nuestra Señora de Altagracia, une célébration haute en couleurs en République Dominicaine.
Des chants, des danses, des veillées nocturnes et des festivals ont lieu à Higuey, mais aussi dans plusieurs autres grandes villes de la République Dominicaine. Côté haïtien, le groupe Djakout #1 y était pour animer un total de trois soirées (vendredi-samedi et dimanche), respectivement dans les villes de Santiago, Santo-Domingo et Higuey. La fête de la Nuestra Senora peut être très populaire, mais elle est avant tout religieuse. Le pèlerinage est une expérience conseillée.
DF/Le Floridien
Les origines de cette fête en République Dominicaine
Les origines de la célébration de Notre Dame d’Altagracia sont nombreuses. Il y eut d’abord la légende d’un riche marchand et colon espagnol sur l’île au 16e siècle. Il voulait ramener de Saint-Domingue une image de la Nuestra Senora à sa fille Nina. L’image fut donnée par un vieil homme barbu au colon, vieil homme qui disparut sans laisser de traces. La fille rejoignit son père à Higuey, une ville de la province d’Altagracia, peu de temps après le 21 janvier. Ainsi, la célébration prit place dans cette ville à la même date chaque année, et ce, depuis 1569. Il y eut aussi la victoire des Dominicains sur les Français le 21 janvier (coïncidence ?) 1691 lors de la bataille de la Limonade, non loin du Cap haïtien ; ou la bataille de Sabana. Et selon l’histoire encore, la Vierge d’Altagracia apparut aux soldats de Christophe Colomb lors de la conquête du pays (l’île connue comme Ayiti, Quisquéya ou Bohio, rebaptisée Hispaniola) au 15e siècle.
Mis à jour le vendredi 3 février 2012